L’Éden n’est pas seulement un lieu perdu dans un passé mythique, un paradis terrestre inaccessible. Il est l’image d’un état d’être, d’une harmonie première où l’humain se sait Un avec la Vie, où il n’y a pas encore de rupture entre l’intérieur et l’extérieur, entre soi et l’Infini.
Avant d’être chassés du jardin, Adam et Ève marchent nus sans honte (Genèse 2,25) : ils sont transparents à eux-mêmes, sans masque ni peur, pleinement reliés à ce qui est. L’Éden est cette conscience originelle, ce regard innocent qui ne juge pas, cet espace où tout est offert sans appropriation.
L’expulsion de l’Éden marque la naissance du mental séparateur, du « je » qui se voit distinct, qui veut saisir, contrôler, nommer par peur de perdre. Ce n’est pas une punition, mais un passage : l’entrée dans l’expérience de la séparation, de l’altérité, du désir et du manque.
Mais l’Éden n’est pas perdu, il est voilé. Il ne s’agit pas d’y retourner, mais de le retrouver autrement : non plus comme une innocence inconsciente, mais comme une conscience réconciliée. Il est ce jardin intérieur où, sous nos couches de peur et d’oubli, l’Unité est toujours là, attendant d’être reconnue.