Peut-on vraiment dé-finir l’Infini, si définir signifie lui mettre une limite ?

Ce lexique est vivant, en perpétuelle évolution. Il se transforme au fil de vos questions et de la recherche commune à la Maison bleu ciel.
Les définitions proposées ici ne sont pas des vérités figées, mais des pistes, des invitations à explorer, à questionner, à reformuler. Provisoires, elles ouvrent un chemin, offrent des repères sans enfermer, éclairent sans figer le mystère. Si elles ne résonnent pas en vous, laissez-les de côté. Et si elles vous inspirent d’autres mots, d’autres formulations, suivez cet élan : c’est dans cette dynamique que ce lexique prend tout son sens.
Dans le domaine spirituel, les mots balbutient souvent. Ils ne sont que des éclats, des tentatives imparfaites pour pointer vers l’Indicible. Et au fil du temps, ils ont accumulé des couches, des interprétations, des rigidités qui les éloignent de leur source vive.
Les mots doivent être lavés pour retrouver leur limpidité. Ils ne prennent leur véritable sens que lorsqu’ils sont réaccordés à l’expérience, à la présence, à la résonance intime avec l’Essentiel. Ici, nous ne cherchons pas tant à les définir qu’à les laisser respirer à nouveau, à les délester de ce qui les alourdit pour qu’ils puissent redevenir ce qu’ils sont : des portes ouvertes vers l’Infini.
- CaïnCaïn est le premier-né de l’humanité biblique, celui qui offre mais ne se sent pas reconnu, celui qui regarde son frère et se consume de jalousie. Il incarne cette part en nous qui compare, qui se sent exclue, qui se ferme au lieu de s’ouvrir.Lorsque son offrande n’est pas accueillie comme celle d’Abel, Caïn se replie sur lui-même, envahi par l’amertume. Il croit que l’amour est une compétition, que la bénédiction donnée à l’autre lui est retirée. Il ne voit pas qu’il est lui aussi aimé, mais autrement."Pourquoi es-tu irrité ? Pourquoi ton visage est-il abattu ? Si tu fais le bien, ne relèveras-tu pas la tête ?" (Genèse 4,6-7). L’Infini ne condamne pas Caïn, il l’invite à voir autrement, à ne pas se laisser enfermer dans son ressentiment.Mais Caïn ne répond pas à l’appel. Il choisit la violence, croyant pouvoir résoudre son malaise en supprimant son frère. En lui, nous reconnaissons cette part qui projette sa souffrance sur l’autre, qui croit que la solution est extérieure alors qu’elle est intérieure.Pourtant, même après son acte, Caïn n’est pas abandonné. Une marque lui est donnée, non pour le punir, mais pour le protéger. Il devient un errant, un marcheur, un être en quête. Il nous rappelle que l’exil intérieur n’est jamais une fin en soi, qu’un chemin reste toujours ouvert, même pour celui qui s’est perdu.
- CarêmeLe Carême n’est pas un temps de privation imposée ni un effort moral pour mériter quelque chose. Il est un espace de dépouillement, un retour à l’essentiel.Jeûner, veiller, se recentrer ne sont pas des obligations, mais des invitations à laisser tomber ce qui nous encombre, à retrouver la simplicité d’un cœur ouvert. Ce n’est pas une période de tristesse, mais un chemin de liberté : se délester du superflu pour faire place à la Vie qui cherche à émerge
- ce qui est cachéJésus parle souvent de ce qui est caché : "Ce qui est caché sera révélé." (Luc 12,2).Ce qui est caché n’est pas une vérité extérieure à découvrir, mais une réalité intérieure à laisser émerger. Ce n’est pas un secret réservé à quelques initié-e-s, mais une lumière voilée par notre agitation, nos croyances, nos peurs.L’Essentiel est déjà là, mais il se cache dans l’ordinaire, dans le plus simple. Il se révèle non à ceux et celles qui veulent le posséder, mais à ceux et celles qui savent s’ouvrir.
- chantLe chant n’est pas seulement une mélodie, ni une performance. Il est une vibration qui traverse, un souffle qui prend corps, un passage entre le silence et la parole vivante.Dans la tradition biblique, le Logos est information créatrice, vibration primordiale qui fait surgir l’existence : "Au commencement était le son, la vibration..." (Jean 1,1). Le chant est une résonance de cette parole première, un écho du souffle créateur.Le chant ne naît pas du bruit, il naît du silence. Il en surgit et y retourne, comme une vague qui prend forme avant de s’effacer. Chanter, c’est entrer dans ce mouvement, se laisser résonner sans chercher à retenir.C’est l’union du souffle, du corps et de l’instant, une présence qui se donne sans s’approprier. Lorsque le chant n’est plus contrôlé mais offert, il devient prière, ouverture, pure vibration de l’Être.Là où nous cessons de chanter avec notre "souci de soi" et que nous nous laissons chanter par plus vaste que nous, le son devient Logos, et le chant nous reconduit au silence habité.
- chèvreDans la Bible, la chèvre est souvent mise en contraste avec le mouton. Là où le mouton suit, la chèvre grimpe, s’écarte, trace sa propre voie. Elle représente une part plus rebelle, plus instinctive, qui cherche sa liberté hors du troupeau.Dans certaines paraboles, comme celle du jugement des nations (Matthieu 25,31-46), les chèvres sont placées à gauche, en opposition aux brebis à droite. Mais il ne s’agit pas de condamner : la chèvre symbolise cette énergie en nous qui ne veut pas se laisser guider, qui se méfie de la vulnérabilité, qui garde ses distances.C’est la part de nous qui veut garder le contrôle, choisir seule sa route, quitte à s’isoler. Elle n’est pas mauvaise : elle peut porter une grande force de vie, un courage, une indépendance. Mais si elle reste coupée du Souffle et du cœur, elle devient séparation, dureté, solitude.En nous, la chèvre est cette part libre et sauvage, qui a besoin d’être reconnue, apprivoisée, réintégrée dans un chemin d’unification intérieure. Lorsqu’elle consent à ne plus fuir l’Essentiel, elle devient élan, audace, puissance d’incarnation.
- ChristPlus qu’un simple personnage historique, le Christ représente le JE-SUIS, la pleine réalisation de l’Unité entre le divin et l’humain. Il est le modèle du réveil à notre nature profonde.Le Christ donc n’est pas un titre réservé à Jésus de Nazareth, mais une réalité vivante en chacun. Il ne s’agit pas de croire en lui comme en un personnage extérieur, mais de laisser émerger en soi cette dimension qui relie tout.
- cieuxLes "cieux" dans la Bible ne désignent pas un lieu lointain au-dessus de nos têtes, ni un espace séparé du monde terrestre. Ils sont l’espace de l’Ouvert, la dimension invisible où l’Infini se révèle.Quand Jésus parle du Royaume des cieux, il ne désigne pas un paradis futur, mais une réalité déjà là, qui se laisse entrevoir à celui ou celle qui s’ouvre à l’Essentiel. Les cieux ne sont pas ailleurs, ils sont au-dedans de nous, cachés sous les voiles de nos peurs et de nos illusions.
- colèreLa colère n’est ni bonne ni mauvaise en soi. Elle est une énergie brute, un feu qui surgit lorsqu’une limite est franchie, lorsqu’un élan de vie est entravé. Elle peut être destructrice lorsqu’elle nous consume de l’intérieur, mais aussi juste lorsqu’elle éclaire une vérité et remet les choses à leur place.Dans la Bible, la colère n’est pas absente de l’expérience divine : elle est parfois décrite comme un feu purificateur, non pour écraser, mais pour réveiller. Jésus lui-même se met en colère dans le Temple (Jean 2,15-16), non par haine, mais pour dénoncer ce qui trahit l’Essentiel.La colère est cette part en nous qui refuse l’injustice, qui sent profondément qu’un déséquilibre est là. Mais elle devient enfermante lorsqu’elle se nourrit d’elle-même, lorsqu’elle ne se transforme pas en clarté. Si elle est laissée à l’égo, elle devient rancune, opposition stérile. Si elle est reconnue et traversée, elle devient un feu qui éclaire, une énergie qui remet en mouvement.La colère n’est pas un ennemi à combattre, mais un feu à écouter. Elle est une force qui peut consumer ou éclairer, une flamme qui nous invite à discerner : brûler dans l’agitation, ou laisser ce feu devenir lumière.
- colère de DieuLa colère de Dieu est souvent mal comprise comme un accès de rage divine contre l’humanité. Pourtant, dans la Bible, elle désigne moins une émotion de vengeance qu’un mouvement de Vie qui refuse l’injustice.Ce n’est pas une colère destructrice, mais une énergie qui cherche à remettre les choses en juste place. Comme un feu qui brûle ce qui est mensonger pour révéler ce qui est vrai.L’Infini n’est pas un être colérique à apaiser. Ce que nous appelons colère de Dieu, c’est parfois la force même de la vérité qui se manifeste, bousculant nos illusions.
- combat spirituelLe combat spirituel n’est pas une lutte contre un ennemi extérieur, ni un affrontement entre le bien et le mal comme deux forces opposées. Il est une traversée intérieure pour chercher à unifier ce qui nous divise.Dans la Bible, Jésus lui-même traverse ce combat : au désert face aux tentations, à Gethsémani dans l’angoisse, sur la croix dans l’abandon. À chaque fois, il ne repousse pas l’épreuve, mais il l’accueille sans s’y enfermer. Le véritable combat n’est pas de vaincre, mais de ne pas se laisser enfermer dans la peur, l’illusion de séparation, ou l’attachement à l’égo.L’épreuve révèle les résistances, les ombres, les parts de nous qui s’accrochent. Mais combattre ne signifie pas écraser ou fuir : c’est voir ce qui veut nous enfermer et choisir de ne pas s’y identifier.En nous, le combat spirituel est cette tension entre l’illusion d’être séparé-e et l’appel à l’Unité. Il ne se gagne pas par la force, mais par le lâcher-prise, par la confiance en ce qui est plus vaste que le moi. Ce n’est pas un combat contre, mais un passage à travers, jusqu’à l’Ouvert.
- commandementsIls ne sont pas des ordres venus d’en haut, ni un cadre moral qui enferme. Ce sont des invitations à vivre pleinement, en sortant des enfermements de l’égo. Ce sont des chemins d’élargissement, des clés qui ouvrent un passage en nous pour que l’Être circule librement.
- compassionLa compassion n’est pas une pitié distante ni un simple sentiment de bienveillance. Elle est une ouverture du cœur qui nous rend perméables à la souffrance de l’autre, non pas pour la porter à sa place, mais pour l’accompagner avec justesse.Être dans la compassion, ce n’est pas vouloir sauver ou réparer, mais être présent-e, en résonance avec l’autre, sans séparation. C’est reconnaître en l’autre une part de soi, et dans soi une part de l’autre.
- conversionSe convertir ne signifie pas adhérer à une nouvelle croyance ou changer de religion. En grec biblique, metanoia signifie "changer de regard".La conversion véritable n’est pas extérieure, mais intérieure : c’est un retournement du cœur, un basculement qui nous fait voir le monde autrement. Elle n’est pas un événement ponctuel, mais un mouvement constant d’ouverture
- corpsLe corps n’est pas un simple véhicule de l’âme, ni un obstacle à dépasser. Il est un allié, un guide vers l’instant présent, un ancrage qui nous ramène à ce qui est, ici et maintenant.Dans la Bible, l’Infini ne se révèle pas en dehors du corps, mais à travers lui : "Le Logos s’est fait chair." (Jean 1,14). L’Être se dit dans la matière vivante, dans le souffle, dans la sensation.Nous avons souvent un rapport conflictuel au corps : nous le jugeons, nous le contraignons, nous l’ignorons. Pourtant, il est notre premier temple, non parce qu’il serait parfait, mais parce qu’il est le lieu où nous pouvons faire l’expérience du réel sans filtre.Le corps ne ment pas, il sent, il vibre, il nous relie à la terre, à l’espace, aux autres. Il porte la mémoire, accueille l’émotion, traduit l’instant. Lorsque nous l’écoutons, il devient un passage vers l’Ouvert, un chemin de présence où chaque respiration nous ramène à la Vie qui circule.Habiter son corps, ce n’est pas s’y enfermer, c’est s’ancrer pleinement pour mieux laisser passer le souffle. Là où nous cessons de lutter contre lui, il devient une porte vers l’Unité.
- corps du ChristLe "Corps du Christ" n’est pas une entité institutionnelle, ni un groupe délimité par des frontières visibles. Il est l’unité vivante de tout ce qui se reconnaît dans l’Essentiel. Là où des êtres s’éveillent à l’unité et à la Présence, le Corps du Christ est déjà là, au-delà de toute appartenance.
- corps et âmeLa tradition occidentale a souvent séparé le corps et l’âme, opposant le matériel et le spirituel. Mais dans la Bible, l’être humain est une unité : le corps n’est pas un simple habit temporaire, il est pleinement lieu de la Présence.L’âme n’est pas une étincelle enfermée dans un corps étranger, elle est la vie qui circule en nous, la respiration profonde de l’être. Retrouver cette unité, c’est retrouver la plénitude d’être vivant-e, sans rejet d’aucune part de soi.
- crainte de DieuLa "crainte de Dieu" n’est pas une peur paralysante face à une puissance qui jugerait et punirait. En hébreu, ce mot évoque avant tout un saisissement, une ouverture à quelque chose de plus grand que soi. C’est la conscience d’être face à l’Infini, une humilité qui naît de la reconnaissance de notre place dans le Tout.Craindre Dieu, ce n’est pas trembler devant une menace, mais entrer dans un respect profond, un émerveillement face au Mystère qui nous dépasse et nous habite à la fois. Cette crainte n’éloigne pas, elle attire, elle ouvre à une relation vivante avec l’Essentiel.
- créationLa création n’est pas un événement du passé, un acte figé dans le temps. Elle est un mouvement, un jaillissement continuel, un souffle qui renouvelle à chaque instant ce qui est, l'instant où tout naît, encore et encore...Dans la Bible, la création commence par un appel : "Que la lumière soit." (Genèse 1,3). Ce n’est pas un simple début, mais un dévoilement, une mise en lumière de ce qui était en gestation dans l’Inconnu.Nous avons souvent l’image d’un monde créé une fois pour toutes, achevé. Pourtant, l’Infini crée sans cesse. "Voici, je fais toutes choses nouvelles." (Apocalypse 21,5). La création est un acte toujours en cours, une invitation à naître et renaître, à laisser l’Être se déployer en nous.En nous, la création est cet espace où quelque chose peut surgir lorsque nous lâchons prise, lorsque nous cessons de vouloir maîtriser et que nous nous laissons traverser. Là où nous nous ouvrons à l’instant, où nous accueillons l’inattendu, la création continue.Elle n’est pas une possession, mais un élan, une offrande, un mystère en mouvement. La question n’est pas tant "quand la création a-t-elle eu lieu ?" que "suis-je disponible pour qu’elle advienne, ici et maintenant ?".
- créativitéLa créativité n’est pas un simple talent ni un effort pour produire quelque chose d’original. Elle est un passage, un espace où ce qui ne peut pas se dire avec des mots cherche à prendre forme.Avant toute expression, la créativité est un accueil. Quelque chose se manifeste en nous, d’abord flou, insaisissable, au-delà du mental. Elle émerge du silence, du sensible, d’une écoute intérieure où l’Inconnu peut se révéler.Dans la Bible, avant que l’Infini dise "Que la lumière soit." (Genèse 1,3), il y a le Souffle qui plane sur les eaux. Toute créativité commence ainsi : par un souffle, un mouvement intérieur qui précède la forme.Créer ne vient pas d’un contrôle, mais d’un lâcher-prise, d’une disponibilité à ce qui veut naître à travers nous. C’est se laisser traverser, donner un corps à ce qui cherche à s’incarner, tout en sachant que nous ne sommes pas la source, mais le canal.La créativité est ce qui fait surgir l’invisible dans le visible, l’indicible dans l’expression, le silence dans la matière. C’est une manière d’être traversé-e par la Vie, sans vouloir la retenir, en lui permettant simplement d’advenir.
- croixLa croix n’est pas un instrument de souffrance glorifiée ni un symbole de sacrifice imposé. Elle est le lieu du passage, le point où se rencontrent l’horizontal et le vertical, le temps et l’éternité, le fini et l’Infini. Mourir sur la croix, c’est lâcher l’attachement à l’égo et à ses luttes pour entrer dans l’espace vaste de l’Être.