L’éternel n’est pas une durée infinie ni un temps prolongé à l’infini. Ce n’est pas l’opposé du temps, ni un futur lointain où tout serait enfin accompli. Quand on le pense comme une continuité sans fin, on l’enferme encore dans la logique des horloges, alors qu’il échappe à toute mesure.
L’éternel est ce qui est présent, ici et maintenant, sans commencement ni fin. Il ne se situe pas après la mort, mais au cœur de chaque instant quand on cesse de le fragmenter. Il n’appartient pas au passé ou à l’avenir, il se révèle dans la profondeur du présent, là où le temps s’ouvre et devient transparent à la Source.
Il ne s’oppose pas au temps, il respire en lui. Il se cache dans chaque instant pleinement vécu, dans cette présence qui ne se mesure pas. Ce n’est pas un autre monde, mais la profondeur de celui-ci, l’arrière-fond silencieux où tout naît et retourne.
Les Écritures disent : « Avant que les montagnes fussent nées… de siècle en siècle, tu es Dieu » (Psaume 90,2), et encore : « Le Royaume est au-dedans de vous » (Luc 17,21). L’éternel n’est donc pas après, mais dedans : dans le souffle qui passe et pourtant demeure. Le reconnaître, c’est sentir que chaque instant contient tout le temps, que la vie visible n’est qu’un battement de l’invisible, et que vivre le présent, c’est déjà toucher ce qui ne passe pas.