nuit obscure

Ce que saint Jean de la Croix appelle la nuit obscure n’est pas une simple crise ni un passage difficile. C’est un effacement profond des repères de l’égo, une descente dans l’obscurité où toute lumière familière semble éteinte. Mais ce n’est pas une absence : c’est le moment où l’âme — ou plutôt, l’égo — cesse de régner, où tout ce qui semblait solide se dissout pour laisser place à l’Essentiel.

Dans cette nuit, la prière ne réconforte plus, les mots perdent leur saveur, la foi ne se sent plus. L’égo se débat, cherche un appui, mais le silence s’épaissit. Et pourtant, quelque chose se prépare, dans l’ombre, sans bruit : une alchimie intérieure.

Saint Jean parle de cette nuit comme d’un chemin vers l’union, une transformation douloureuse mais nécessaire, comme la chrysalide avant l’éveil du papillon, ou comme l’amour qui conduit, dans l’obscurité, plus sûrement que la lumière du jour.

Ce n’est pas la nuit de la perte, mais celle du dépouillement. Ce n’est pas la mort de l’âme, mais la mort de ce qui l’empêchait d’aimer pleinement. Loin d’être un échec spirituel, c’est souvent le lieu d’une renaissance silencieuse, le seuil de l’union avec le Je-suis. Une traversée silencieuse où l’égo se défait pour que l’Être advienne.

La nuit noire de l’âme est ce passage mystérieux où le Souffle travaille en secret, non pour nous consoler, mais pour nous révéler. C’est l’aube invisible de l’Être.

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