1. Avant la fête de la Pâque, Jésus, sachant que son heure était venue, celle de passer de ce monde vers le Père, ayant aimé les siens dans le monde, il les aima jusqu’au bout.
Jean 13, 1-8
2. Et durant le repas, le diable ayant déjà mis dans le cœur de Judas, fils de Simon Iscariote, l’intention de le livrer, 3. Jésus, sachant que le Père avait tout remis entre ses mains, et qu’il était venu de Dieu et qu’il allait vers Dieu, 4. se lève du repas, dépose son vêtement, et prenant un linge, il se ceint. 5. Ensuite, il verse de l’eau dans un bassin, et il commence à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge dont il était ceint.
6. Il vient donc à Simon Pierre, qui lui dit : « Toi, Seigneur, tu me laves les pieds ? » 7. Jésus répondit et lui dit : « Ce que je fais, tu ne le sais pas maintenant, mais tu comprendras après. » 8. Pierre lui dit : « Tu ne me laveras jamais les pieds. » Jésus lui répondit : « Si je ne te lave pas, tu n’as pas de part avec moi. »
Comment faire l’expérience directe du Je-suis de Dieu ? Comment goûter à cette Présence plus vaste que nous, plus intime que nous, et pourtant toujours là ?

Jésus, au dernier soir de sa vie, ne répond pas à ces questions par des paroles. Il ne fait pas de discours. Il ne transmet pas une doctrine. Il pose un geste. Il s’agenouille. Il se fait serviteur. Il lave les pieds. Geste bouleversant. Geste ultime. Geste qui dit tout.C’est un geste d’amour extrême. Un geste de corps. Un geste de relation. Il ne s’agit pas de croire, mais de se laisser toucher. De se laisser aimer.
Car si la Cène nourrit le Je-suis en nous, le lavement des pieds en prend soin. Il veille sur cette Présence. Il la sert. Il l’honore dans la fragilité de notre humanité.
Les pieds, c’est notre ancrage. Ce qui nous relie à la terre. Ce qui porte nos fatigues, nos élans, nos blessures. C’est intime. C’est vulnérable.En lavant les pieds de ses disciples, Jésus rejoint cette part en nous qui n’a pas besoin de comprendre mais de se sentir reconnue, touchée, relevée.Il ne vient pas expliquer. Il vient aime, jusqu’à l’extrême.
Ce geste ne va pas de soi. Pierre résiste. Comme nous : il y a en nous une part qui veut donner mais pas recevoir, qui veut contrôler mais pas s’abandonner.
Recevoir, c’est se laisser dépouiller,c’est descendre dans ses pieds, c’est accepter que l’amour s’exprime là où on ne l’attend pas. Donner, c’est oser se mettre à genoux. Non pour s’abaisser, mais pour relever, pour dire : tu es digne d’amour, jusque dans ta poussière.
Une vision qui accueille les paradoxes nous aide ici : ce qui semble fragile est la porte du Vivant, ce qui semble banal peut devenir sacré, ce qui est petit est grand. Ce geste nous déplace. Il ne s’explique pas, il s’expérimente. Il fait tomber nos masques. Il ouvre à l’intime. Il touche au Je-suis.
Et dans ce geste, ce n’est pas seulement un corps qui est lavé. C’est un cœur qui est rejoint, une conscience qui s’éveille, une Présence qui se donne.
Sommes-nous prêts à cela ? À nous agenouiller devant l’autre ? À nous laisser aimer dans nos pieds d’humanité ? À reconnaître la tendresse comme le lieu d’un éveil spirituel profond ?
Ce texte fait partie d’un chemin pour la semaine de Pâques.
Un texte par jour, comme une invitation à l’écoute intérieure, à l’éveil du Je-suis, à partir des récits bibliques relus dans une perspective non-duelle.