Se laisser éveiller à la résurrection

Le matin de Pâques, quelques femmes découvrent que la pierre du tombeau de Jésus a été roulée de côté. Elles entrent et ne trouvent pas son corps. Deux êtres lumineux leur apparaissent et leur disent : « Pourquoi cherchez-vous parmi les morts celui qui est vivant ? Il n’est pas ici, il est ressuscité. »

Elles courent porter la nouvelle aux disciples, mais ceux-ci ne les croient pas. Seul Pierre se lève, court au tombeau, voit les bandelettes de lin abandonnées, et rentre chez lui, stupéfait.

Ce récit, au cœur de la foi chrétienne, n’est pas une histoire facile à croire. Aujourd’hui encore, la résurrection interroge. Est-elle crédible ? N’est-ce pas une douce illusion ? Comment parler de lumière dans un monde en proie à l’injustice et à la souffrance ? Comment croire au renouveau quand tout semble figé dans la mort ?

La résurrection ne se comprend pas seulement avec l’intellect. Elle demande un changement de regard, une ouverture à une autre perception de la réalité. Elle ne relève ni du miracle physique, ni d’un simple retour à la vie d’avant. Elle est un basculement, une expérience d’éveil où l’Éternel se révèle dans l’instant présent.

Une expérience de conscience

Ce que les textes nous disent, c’est que Jésus ressuscité n’est plus reconnaissable comme avant. Il faut le RE-connaître, d’une manière nouvelle. Cela nous invite à dépasser nos schémas habituels, à ouvrir notre perception à une réalité plus vaste.

La résurrection n’est pas un phénomène extérieur que l’on pourrait observer avec nos sens ordinaires. C’est une transformation intérieure, une traversée de la finitude vers l’infini. C’est le surgissement de l’éternité dans notre quotidien.

Mais alors, comment en faire l’expérience ? Comment s’ouvrir à cette réalité ?

Quelques chemins vers l’éveil

  1. Se laisser aimer
    La première invitation est celle de l’amour. Pas l’amour que l’on donne, mais celui que l’on reçoit. Se laisser aimer sans condition, sans attente en retour. Cela peut passer par l’expérience d’un amour humain profond, mais aussi par le simple fait de se sentir porté par la vie elle-même. Se rendre disponible à cette tendresse fondamentale est une première porte vers la résurrection intérieure.
  2. Se laisser nourrir par la beauté
    La beauté a une puissance de résurrection. Elle nous ouvre à la présence. Une fleur qui s’épanouit, le vent dans les arbres, un chant, une parole lumineuse… Tout peut être signe d’éveil, si l’on s’arrête pour vraiment voir. Jésus lui-même voyait partout des signes du Royaume : dans un grain de blé, une perle précieuse, un repas partagé.
  3. La proximité de la mort
    Face à la mort, bien des personnes témoignent d’un élargissement de conscience. Que ce soit à travers des expériences de mort imminente ou simplement en accompagnant un être cher dans ses derniers instants, il arrive que quelque chose se révèle : une Présence, une lumière, une évidence que la vie ne s’arrête pas là. Ce moment où le temps suspend son cours est parfois une porte vers la résurrection.
  4. L’expérience du vide
    Paradoxalement, c’est aussi dans l’absence, le manque et l’épreuve que l’on peut toucher une autre réalité. L’impasse devient passage. Le désert devient lieu de rencontre. C’est dans le vide que peut surgir l’essentiel.
  5. Les états modifiés de conscience
    Certaines pratiques comme la respiration, le chant, la danse, la méditation ou le silence profond permettent d’élargir la conscience. Beaucoup ont fait l’expérience, à travers ces pratiques, d’un basculement où l’on entre en contact avec une dimension de soi qui dépasse le temps et l’espace.
  6. La fidélité au silence et à la parole
    Enfin, la simple répétition d’une parole de vie, le chant, la prière ou la méditation quotidienne façonnent peu à peu une intériorité ouverte à l’infini. Comme une pierre polie par l’eau, l’âme se laisse transformer par la Parole et le silence.

Un éveil à l’éternité

La résurrection, ce n’est pas un événement du passé, ni une promesse pour l’après-mort. C’est une expérience qui peut advenir ici et maintenant. Chaque instant est une occasion de laisser surgir l’infini au cœur du fini. D’ouvrir les yeux sur une réalité plus vaste, où l’Éternel se goûte dans le simple fait d’être vivant.

La Pâque du Christ nous invite à cela : à reconnaître la lumière au cœur de l’ombre, à laisser naître ce qui en nous ne meurt pas.

Nils Phildius, 2 avril 2024