Carême : retour à la Source

Le Carême va commencer. Quarante jours pour ralentir, simplifier, revenir à l’essentiel. Trop souvent, on l’imagine comme un temps de privation, une somme d’efforts à fournir. Mais est-ce vraiment cela ? Et si, au lieu d’une contrainte, c’était une invitation ?

Le Carême n’est pas une course vers la perfection. Il n’est pas un exercice de volonté. Il est un espace de liberté. Un temps pour se délester de ce qui encombre et nous disperse. Un temps pour goûter à la légèreté.

Jésus, juste après son baptême, est conduit au désert. Pas pour prouver quoi que ce soit, mais pour expérimenter la parole reçue : « Tu es mon Fils bien-aimé, en toi je me reconnais. » Le désert est un lieu de clarification et de vérification, un espace où l’essentiel émerge quand le bruit du monde s’efface.

Le Carême peut être ce désert où nous nous arrêtons. Où nous écoutons, non pas les agitations extérieures, mais les murmures intérieurs. Où nous discernons ce qui nous alourdit et nous assèche.

Changer de regard : un retour à l’essentiel

Il ne s’agit pas de se priver pour se priver, mais de faire place à la vie. D’être attentif à ce qui a soif de grandir en nous. Le Carême est un ralentissement. Un arrêt. Une manière de veiller sur cette présence intérieure fragile, comme une flamme que l’on protège du vent.

Se délester du trop-plein

Etty Hillesum disait : « Un puits très profond est en moi. Et en ce puits, il y a Dieu. Parfois, j’y parviens. Mais plus souvent, il est recouvert de pierres et de sable : alors Dieu est enseveli. Il faut le remettre à jour.« 

C’est exactement cela, le Carême : déblayer ce qui encombre. Dégager le puits pour que l’eau vive jaillisse à nouveau.

Le jeûne : un espace de clarté

Pourquoi Jésus jeûne-t-il au désert ? Non pour souffrir, mais pour voir plus clair. Pour expérimenter qu’il ne manque rien. Le désert paraît vide, mais c’est un espace de décantation, où l’agitation se pose et l’Essentiel devient visible.

Jésus affronte trois tentations, qui sont aussi les nôtres :

  1. Transformer les pierres en pain : la peur du manque. Cette voix qui veut tout remplir immédiatement, consommer pour combler un vide. Mais Jésus répond : « L’humain ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui jaillit de la Source. »
  2. Se jeter du haut du Temple : le besoin de prouver sa valeur. Cette voix qui cherche à exister dans le regard des autres. Mais Jésus ne tombe pas dans ce piège : « Tu ne mettras pas l’Essentiel à l’épreuve. »
  3. Recevoir tous les royaumes du monde : la soif d’accumulation et de pouvoir. Cette illusion qui fait croire que posséder rendra heureux. Mais Jésus choisit une autre voie : « Va-t’en. Seule la Source est digne d’être servie. »

Ces voix, nous les entendons aussi. Mais comme Jésus, nous pouvons choisir de ne pas les nourrir. Nous pouvons voir ce qui nous disperse, ce qui nous illusionne, et prendre un autre chemin.

Une autre présence

Dans le silence du désert, une autre réalité émerge. Le texte dit que « des anges le servaient ». Peut-être est-ce cela : quand on cesse de nourrir ce qui nous disperse, une plénitude se révèle, une présence qui était déjà là.

Vivre le Carême autrement : une proposition en trois étapes

1. Observer ces voix en nous
Le désert de Jésus est aussi le nôtre. Ces tentations résonnent en nous au quotidien. Pendant ce Carême, nous pouvons les observer en nous-mêmes :

  • Où dans ma vie ai-je peur du manque ? Qu’est-ce que je cherche à remplir sans cesse ?
  • Ai-je besoin de prouver quelque chose aux autres, ou à moi-même ?
  • Est-ce que je cherche la sécurité dans l’accumulation, le contrôle, la réussite extérieure ?

2. Choisir un autre chemin
Au lieu de fuir ou de combattre ces voix, il s’agit de les voir, d’en prendre conscience… et de ne pas s’y identifier. Comme Jésus, nous pouvons choisir une autre réponse :

  • Comment puis-je accueillir le vide sans chercher à le remplir immédiatement ?
  • Puis-je apprendre à exister sans prouver, sans me justifier ?
  • Suis-je prêt-e à lâcher le contrôle et à faire confiance à l’instant présent ?

3. Faire place à une autre Présence
Lorsque nous cessons de nourrir ces illusions, un autre espace s’ouvre. Une Présence paisible, sans exigence. Une évidence qui était là depuis toujours.

  • Comment puis-je m’ouvrir à cette Présence dans mon quotidien ?
  • Quels petits gestes ou temps de silence pourraient m’aider à l’écouter davantage ?

    Ce Carême peut être un temps pour revenir à l’essentiel, pour voir ce qui nous encombre… et laisser jaillir ce qui est déjà là : la joie de la Présence.

    Nils Phildius, 3 février 2025


    Pour aller plus loin, vous pouvez regarder la vidéo de l’Heure bleu ciel sur ce thème

    2 commentaires à propos de “Carême : retour à la Source”

    1. Merci beaucoup pour cette manière de parler du carême. J’ai aussi beaucoup apprécié les explications des mots importants cités en bleu.

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